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Une coopération Québec-Mexique en philosophie appliquée à des interrogations contemporaines

Le professeur Sébastien Charles, de l'UdeS; Laura Benítez et José Antonio Robles, de la Universidad Nacional Autónoma de México; Syliane Malinowski-Charles, de l'Université Bishop's; et le professeur Benoît Castelnérac, de l'UdeS.
Le professeur Sébastien Charles, de l'UdeS; Laura Benítez et José Antonio Robles, de la Universidad Nacional Autónoma de México; Syliane Malinowski-Charles, de l'Université Bishop's; et le professeur Benoît Castelnérac, de l'UdeS.

22 mai 2008

France Lavoie

Deux professeurs de philosophie de l'Université de Sherbrooke, Sébastien Charles et Benoît Castelnérac, participent actuellement au colloque La philosophie et les sciences au Mexique à titre de conférenciers. Ce colloque compte parmi de nombreux événements organisés dans le cadre d'un projet de coopération entre l'UdeS, l'Université nationale autonome de Mexico (UNAM) et l'Université autonome de la Ville de Mexico (UACM) et financés notamment par le ministère des Relations internationales du Québec.

Ce projet de recherche tente de jeter un regard croisé sur le rôle et la fonction de la philosophie dans les sociétés contemporaines à partir de visions à la fois parallèles et antagonistes, celle du Mexique et celle du Québec. Comme le décrit Sébastien Charles, professeur au Département de philosophie de la Faculté de théologie, d'éthique et de philosophie : «Ces visions sont parallèles dans le sens où les sociétés mexicaine et québécoise ont de nombreux points communs, notamment en ce qui a trait à leur histoire coloniale et politique (langue latine, culture religieuse catholique, démocratie pluraliste). Mais elles sont aussi antagonistes, car leur histoire récente est assez différente sur les plans religieux, social, économique et idéologique. En effet, la laïcisation de la société québécoise n'a pas d'équivalent au Mexique, la mixité québécoise est récente et tient à un multiculturalisme là où l'indianité est un trait constitutif de la nation mexicaine, les différences de statut et de classe sont plus marquées au Mexique, et la perspective révolutionnaire a longtemps nourri l'imaginaire mexicain et guère l'imaginaire québécois.»

Retombées de cette coopération

La place et la nature de la philosophie sur ces thèmes, au sein des deux sociétés, permettra donc aux professeurs présents de discuter et de jeter un regard neuf sur le sujet à partir d'autres perspectives. Outre ces échanges, ce projet de coopération renforcera les liens entre le Laboratoire de recherche sur la pensée moderne et l'Instituto de Investigaciones Filosóficas afin de créer une dynamique de recherche plus forte entre les deux institutions, notamment par la possible mise en place d'échanges d'étudiants de cycles supérieurs.

Nos conférenciers au Mexique

La conférence de Sébastien Charles portera sur la place des sciences dans les sociétés hypermodernes. Sa conférence tente, dans un premier lieu, de disqualifier le concept de postmodernité. Comme il l'explique : «Elle implique au niveau de sa définition même une sortie de la modernité. Or, tout laisse à penser que non seulement nous ne sommes pas sortis de la modernité, mais plutôt que celle-ci s'est radicalisée, d'où l'idée d'évoquer une hypermodernité.» En deuxième lieu, il expose que les découvertes scientifiques de même que les techniques n'ont plus de visées humanistes comme par le passé, mais se font surtout en vue d'un profit immédiat. Ceci, jumelé au fait que les découvertes scientifiques se font de plus en plus rapidement, laisse la voie libre au progrès scientifique. Sans balises éthiques ni structures publiques pour l'encadrer, ce progrès risque de nuire aux idéaux démocratiques que nous nous sommes donnés comme société, ceux garants de notre liberté et de l'égalité.

La conférence de Benoît Castelnérac portera quant à elle sur Les vertus du philosophe – Réflexions sur le cosmopolitisme et la magnanimité d'Alexandre le Grand. La première partie de sa conférence traite de l'histoire philosophique de la magnanimité, soit la grandeur d'âme. Ce survol rapide nourrit sa réflexion sur les vertus politiques et le cosmopolitisme d'Alexandre le Grand. En s'inspirant des écrits de Plutarque, le conférencier décrit Alexandre le Grand comme un homme désireux de faire disparaître les frontières entre les peuples grecs et les autres. Pour ce faire, il s'y prend de trois façons : en s'assurant d'une amitié politique comme moyen de stabiliser ses conquêtes, en éduquant ses amitiés et en adoptant ouvertement les coutumes étrangères des peuples conquis. Comme le souligne le professeur Castelnérac : «En concédant les sacrifices nécessaires au mélange entre les peuples, la grandeur d'âme agit comme le moteur de l'amitié politique qui consiste à faire disparaître la frontière entre soi-même et l'étranger.» Alexandre serait ainsi l'incarnation d'idéaux qui éclairent encore aujourd'hui notre rapport à l'étranger.

Trois conférenciers mexicains viendront à l'Université de Sherbrooke cet automne, dans le prolongement du projet de recherche, dans le cadre d'un colloque portant sur la question du bonheur et de la sagesse aujourd'hui. Ce colloque permettra aux étudiants et professeurs québécois d'enrichir leur réflexion à partir d'autres perspectives, mexicaines cette fois.